CIELT - Centre international d'études sur le linceul de Turin
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L’anatomie

Caractéristiques générales

L’image du Linceul est celle d’un homme jeune, de 30 à 35 ans, bien bâti et musclé. Il est nu, barbu, et porte les cheveux longs. Sa taille varie, selon les scientifiques, entre 178 et 181 cm ; elle est donc grande mais pas exceptionnelle, la taille moyenne des hommes d’un cimetière juif du Ier siècle (Giv’at ha Mivtar) se situant autour de 177 cm. Le poids varie aussi entre 71 et 79 kg. Crâne mésocéphalique (de longueur moyenne) et nez mésorhinien à la limite du leptorhinien (long et étroit). Type général : méditerranéen pour ne pas dire sémitique.

On peut affirmer que cet homme est un Juif. Ian Wilson s’est en effet aperçu que la photographie du dos montre une mèche de cheveux descendant jusqu’entre les omoplates. Il s’agit d’une tresse défaite. Les Juifs de l’Antiquité portent fréquemment ainsi dans le dos une tresse formée de cheveux conservés plus longs que les autres. On attribue cet usage au naziréat que pratiquaient les Nazaréens, cette consécration de durée choisie décrite par la Bible (Nombres 8, 1-21). Il faut ajouter que l’homme du Linceul a été enseveli à la manière juive, attestée à Qûmran : allongé, la tête légèrement relevée, les mains croisées sur le bas du ventre, des pièces de monnaie sur les yeux.

Les nombreuses taches de sang et les coulées sanguines montrent que l’homme du Linceul a subi tous les supplices de la Passion décrite par les évangiles : la flagellation, la couronne d’épines, le portement de croix, la crucifixion attestée par les plaies des clous, la mort sur la croix, le coup de lance au côté. On peut même évoquer la descente de croix et le court séjour du corps dans le tombeau.

Tout cela est conforme aux récits évangéliques, mais aucun détail ne concorde avec les habitudes iconographiques alors que tous s’accordent avec les découvertes les plus récentes. Cette constatation suffirait à exclure l’hypothèse d’un faussaire antique ou médiéval bien incapable de connaître ces données.

La médecine légale

Le corps de l’homme du Linceul présente de nombreuses plaies précédent la mort :

  • le dos montre une grande quantité de blessures réparties du cou aux pieds, traces d’une flagellation extrêmement dure ;
  • les traces de sang de la tête, marquent la trace de la couronne d’épines.

La mort du supplicié

Les blessures des mains et des pieds de l’homme du Linceul présentent toutes les caractéristiques de la crucifixion.

Le supplice de la croix est particulièrement atroce, « le plus cruel et le plus terrible » selon Cicéron. Il l’est d’autant plus qu’il peut se prolonger de longues heures. Certains condamnés parviennent à survivre deux jours, peut-être même trois. Les blessures de la crucifixion, si douloureuses soient-elles, ne sont en effet pas mortelles. Le condamné meurt d’asphyxie.

Le crucifié se trouve suspendu au bois de la croix par les trois clous enfoncés dans sa chair sans aucun support pour les pieds, ni aucun siège pour le soulager d’une partie de son poids. Les clous des poignets soutiennent le corps qui pend et ne trouve d’appui que sur le clou des pieds. La cage thoracique se trouve donc bloquée en élongation, interdisant la respiration.

Afin d’échapper à l’asphyxie, il faut au crucifié se soulever sur le clou des pieds en tirant sur les clous des mains pour pouvoir libérer sa cage thoracique et remplir ses poumons. Cet effort provoque une souffrance intolérable et le malheureux retombe épuisé. Il lui faut recommencer sans cesse ce geste. Le Linceul le montre clairement : les coulées de sang descendues des poignets le long des avant-bras, celles qui sont encore fraîches au moment de l’ensevelissement, forment successivement des angles de 55° et 65° en fonction des phases de respiration et d’affaissement.

La mort finit par survenir par asphyxie à la suite de l’épuisement du condamné. D’une part, l’effort devient de plus en plus pénible, difficile, le mouvement perd de son ampleur et donc de son efficacité. D’autre part, par suite de la sueur provoquée par la fatigue et de l’hémorragie continue, le volume sanguin diminue. D’où une soif intense : « j’ai soif » dit le Christ. Mais surtout, le sang, réduit, amène de moins en moins d’oxygène à des poumons de moins en moins gonflés : la respiration devient de plus en plus difficile et limitée. L’asphyxie s’installe.

Sur le Calvaire, la situation évolue en quelques heures jusqu’au paroxysme de la détresse et « Jésus, ayant poussé un grand cri, expira » (saint Marc). On peut penser que ce cri vient de l’affaissement brusque du corps expulsant l’air résiduel des poumons. C’est un corps mort qui reçoit le coup de lance avant la descente de croix.

Le sang

Le Linceul est semé de taches de sang dont les emplacements correspondent à l’anatomie du crucifié telle qu’elle est imprimée dans son image. Ayant imprégné le tissu au moment de l’ensevelissement, elles sont antérieures à l’image elle-même : il n’y a d’ailleurs pas d’image sous les taches, ainsi que cela a été vérifié. La répartition et l’aspect de ces taches permettent de reconstituer les épisodes de la Passion.

On peut noter que tous les détails d’ordre anatomique, physiologique ou pathologique figurant sur le Linceul sont conformes aux connaissances médicales actuelles, bien loin de celles d’un invraisemblable faussaire médiéval. Par exemple, les spécialistes distinguent nettement sur le Suaire le sang artériel et le sang veineux ; or, les premières notions de circulation sanguine sont dues à Harvey au début du XVIIe siècle.

John Heller et Alan Adler, du STuRP, ont démontré que le sang du Linceul est réellement du sang. Outre que les taches sont entourées de cernes de sérum, ces savants y ont trouvé les principaux constituants des globules rouges : porphyrie, hémoglobine, albumine, et bilirubine. On a même noté un excès de bilirubine résultant des grandes souffrances du crucifié.

Pier Luigi Baima Bollone, du Centre de Turin, en utilisant diverses techniques de pointe, a vérifié les travaux américains et est même parvenu à identifier le groupe sanguin : AB, rare mais identique à celui des sangs de Lanciano et d’Oviedo. Toutefois, Jérôme Lejeune, du CIELT, a estimé nécessaire de confirmer l’identification de ce groupe, envisageant un programme de recherches visant à déterminer le caryotype ou carte chromosomique de l’homme du Linceul.

Il faut aussi relever une particularité propre au Linceul. Lorsque l’on sépare un corps ou l’une de ses parties d’un linge collé par du sang séché, lorsque, par exemple, on enlève un pansement, il se produit toujours des arrachements de fibres textiles, d’une part, et de fragments de caillots, de l’autre. Or, on ne voit aucun arrachement sur toute la surface du Linceul, ni du côté des fibres du tissu, ni de celui des nombreuses taches de sang. Une conclusion s’impose : on n’a pas retiré le corps du Linceul ! Cela rejoint la surprenante constatation de saint Jean devant le tombeau vide.

La plaie du côté

Le Linceul montre une image de plaie du côté attribuée à un percement du thorax par une lance. Cette plaie a des caractéristiques que l’on retrouve sur la plupart des icônes représentant le Christ mort : elle est située très haut, presque sous l’aisselle, et très nettement à droite, donc créée par un coup porté de bas en haut depuis l’extérieur du côté droit du thorax du crucifié et dirigé vers l’intérieur, vers son côté gauche. Elle est plutôt latérale, elle n’est pas sur le devant de la poitrine. Enfin elle est particulièrement large, détail qui rappelle les dimensions suggérées dans l’épisode du doute de Thomas (Jn XX, 27), à savoir qu’elle peut admettre une main, et pas seulement un doigt comme dans le cas des plaies des clous.

L’authenticité anatomique de cette plaie a été très largement démontrée par les travaux du chirurgien Barbet, qui a localisé cette plaie, sur des négatifs photographiques, au niveau du cinquième espace intercostal droit et à la jonction des parties antérieure et latérale des côtes. Il a confirmé par une série d’expérimentations sur des cadavres qu’un objet pointu pénétrant le thorax par le côté droit, à l’endroit indiqué précisément par le Linceul, pouvait traverser la plèvre, le poumon droit, le péricarde puis atteindre les cavités cardiaques droites après un trajet d’environ 8 cm, entrainant une sortie de sang et de sérosités par la plaie. Cette plaie du côté correspond à la description de l’évangile de saint Jean : « Et arrivés à Jésus, ils le virent déjà mort. Ils ne lui rompirent pas les jambes, mais un des soldats lui perça le côté avec sa lance et aussitôt sortirent du sang et de l’eau » (Jn, XIX,33-4).

La signification de ce percement du côté par une lance est discutée : pour les uns, il se serait agi d’un « coup de grâce », selon une technique d’escrime des armées romaines, porté sur le côté droit pour passer à côté du bouclier protégeant le cœur du côté gauche (la procédure d’achèvement des crucifiés, le crurifragium, n’ayant pas été utilisée sur l’homme du Linceul puisque l’on ne voit pas d’images de fractures des jambes) ; pour d’autres, il se serait agi simplement d’un geste de vérification de la réalité de la mort du crucifié, le côté percé, droit ou gauche, n’ayant alors aucune importance.

Cette plaie thoracique représente un des éléments de preuve que le Linceul est un vrai linge funéraire d’un homme ayant subi un supplice similaire à celui connu pour J.C. (flagellation, couronnement d’épines, crucifixion, plaie du côté). De plus, on peut remarquer que l’époque à partir de laquelle l’image de la plaie thoracique a été figurée du côté droit sur la majorité des icônes, au VIe siècle, est curieusement la même que celle à laquelle le visage du Christ sur les icônes est devenu le standard de la « Sainte Face ».

L’identification de l’homme du Linceul

L’ancienneté du tissu du Saint Suaire, sa longue histoire et son influence très ancienne sur l’iconographie du Christ, le fait que le corps n’a que fort peu séjourné dans le linge et qu’il y a laissé une image de formation mystérieuse, tout tend à démontrer que l’homme du Linceul est Jésus de Nazareth. Pourquoi d’ailleurs les Chrétiens auraient-ils conservé un objet aussi impur qu’un linceul, aux yeux de la loi, s’il avait contenu quelqu’un d’autre ? Pourquoi nous auraient-ils transmis cette « relique » si elle ne vient pas du Christ, en témoignage de sa Passion et de sa Résurrection ?

A moins que les inscriptions entrevues soient confirmées , on ne peut cependant pas, sur un plan scientifique, affirmer que l’homme du Linceul est bien Jésus. Quelques chercheurs ont pris le problème en sens inverse et calculé combien il y a de chances que ce soit quelqu’un d’autre. Ils ont utilisé le calcul des probabilités en estimant les chances de chaque particularité révélée par le Linceul, comme la couronne d’épines d’utilisation insolite. Les résultats de ces calculs varient beaucoup faute de bases objectives précises.

Par exemple, Kenneth Stevenson et Gary Habermas n’ont voulu retenir que huit caractéristiques et des chiffres modestes : ils arrivent tout de même à réduire à 1 chance sur 83 millions le fait que l’homme du Linceul puisse être quelqu’un d’autre que Jésus Christ. Avec un plus grand nombre de paramètres, Tino Zeuli et Bruno Barberis ne donnent qu’1 chance sur 225 milliards, Vincent Donovan 1 sur 282 milliards, le R.P. Paul de Gail 1 sur 1 000 milliards et le R.P. Francis Filas 1 sur 10 26.