CIELT - Centre international d'études sur le linceul de Turin
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Histoire

L’HISTOIRE DU LINCEUL

ÉVANGILES

Les trois évangiles synoptiques rapportent que Joseph d’Arimathie, ayant acheté un linceul, en a enveloppé le corps de Jésus mort sur la croix. Saint Jean emploie le mot « linges » . En l’espèce, linceul et linges sont équivalents et, comme les mots grecs et latins correspondants, désignent un tissu de lin.
Le surlendemain de l’ensevelissement du corps de Jésus, les apôtres Pierre et Jean, constatent que le tombeau vide ne contient plus que les « linges » (donc le Linceul) restés pliés, et le « soudarion » enroulé à sa place (donc entre les plis du Linceul). Le soudarion ou suaire (du mot « sueur » ) est un grand mouchoir qui a servi de mentonnière. Une mauvaise compréhension du texte de saint Jean amènera à confondre linceul et suaire.

JÉRUSALEM

Du fait de la discrétion requise en temps de persécution et du fait de l’absence totale d’archives de l’époque, on ignore dans quelles conditions le Linceul est conservé pendant les premiers siècles. Une phrase de l’évangile apocryphe des Hébreux, écrit au IIe siècle, atteste toutefois cette conservation.
A défaut de documents écrits, l’iconographie confirme la conservation du Linceul pendant les premiers siècles. Dès le IVe siècle à Rome et plus anciennement en Orient, toutes les représentations du visage du Christ sont inspirées de l’image imprimée sur le Linceul. Les points de ressemblance entre ces représentations et cette image se multiplieront lorsque le linceul pourra être exposé.

ÉDESSE

C’est à Édesse que l’on retrouve la trace du linceul. Cette ville extérieure à l’Empire romain se trouvait à l’abri des persécutions. Apporté sans doute très tôt, le linceul y est conservé plié derrière un treillage d’or, ne laissant voir que le visage. On a en effet répugné pendant les premiers siècles à montrer le Christ souffrant : on le présente triomphant.
La redécouverte d’Édesse. Sans doute, au cours d’une guerre, Le linceul dit « image d’Édesse » ou « mandylion » est si bien mis à l’abri qu’on en perd la trace. On le retrouve au VIe siècle dans les ruines causées par une inondation. Il devient alors le protecteur de la cité et on l’associe à la légende du roi Abgar, contemporain du Christ, une légende qui inspirera celle de sainte Véronique.

CONSTANTINOPLE

Édesse, prise par les Arabes, échappe en 639 à l’Empire byzantin. Ce n’est qu’en 943 que l’armée de l’empereur Romain Lecapène, peut s’approcher d’Édesse de manière si menaçante que l’émir de la ville, pour l’éloigner, lui remet le mandylion qui fait ensuite son entrée solennelle à Constantinople le 15 août 944.
Peu après son arrivée à Constantinople, le mandylion est ouvert, le tissu déplié et reconnu comme Linceul, ainsi que le montre, entre autres, l’Homélie de Grégoire le Référendaire. On suit dans les documents byzantins le sort du Saint Suaire jusqu’au début du XIIle siècle à Constantinople où il est habituellement conservé dans la chapelle du palais impérial.

LE CODEX SKYLITZÈS

Au XIe siècle, l’historien byzantin Jean Skylitzès relate la translation de l’image d’Édesse à Constantinople. Une miniature conservée à la bibliothèque nationale de Madrid, explique très explicitement que le mandylion, ou visage du Christ, est le visage du Christ imprimé sur un linceul immense, de la taille du Linceul de Turin.

LE CODEX PRAY

Peu après apparaît une autre miniature, conservée à la bibliothèque nationale de Hongrie, à Budapest, montrant le Saint Suaire ayant enveloppé le corps du Christ au tombeau. C’est un tissu à chevrons et long comme celui de Turin, portant les traces du Seigneur et les quatre brûlures caractéristiques, antérieures à celles de Chambéry, qui sont visibles sur les copies du XVIe siècle et encore actuellement sur l’original. Des neumes musicaux datent cette miniature d’avant la fin du XIIe siècle.

LE LINCEUL DE CADOUIN

Un linceul, qui a été parfois, surtout au début, considéré comme le linceul du Christ est conservé dans l’abbaye cistercienne de Cadouin. Ce drap antique et vénérable a été rapporté de Terre sainte par les croisés, au début du XIIe siècle.
C’est un beau drap de lin de 1,13 m de large sur 2, 81 m de long. Relique célèbre au XIIIe, il pérégrine dans diverses églises et revient à Cadouin en 1455, où il est encore. Il est orné de broderies fatimides qui datent son séjour en Orient. Les experts sont perplexes. Certains pensent que le drap a l’âge des broderies. L’Église ne le considère pas comme authentique. Son origine arabe mériterait d’être prouvée. Il ne porte aucune trace de mort d’homme.

LA QUATRIÈME CROISADE

La quatrième croisade partie pour l’Égypte, est détournée vers Constantinople. Au cours du séjour des croisés dans la capitale byzantine, l’un d’eux, Robert de Clari, dans un récit rédigé à son retour en France, raconte qu’il a vu dans l’église des Blachernes le « sydoine de Notre Sire » (le linceul de Notre Seigneur) qui porte l’image du corps du Christ.

LE SAINT SUAIRE À ATHÈNES

Le Linceul disparaît en 1204, au cours du sac de Constantinople par les croisés. Une lettre, datée de 1205 et écrite par Théodore Ange (neveu de l’empereur Isaac II) au pape Innocent III, révèle que le Linceul se trouve à Athènes, apporté par un chef des croisés, Othon de la Roche, qui se taille un duché en Grèce. Un prélat voit le Linceul à Athènes en 1206.
Faute d’archives, on ne connaît rien du séjour du Saint Suaire à Athènes. On sait cependant qu’à l’époque, il se trouve entre les mains des Latins, puisqu’on voit, vraisemblablement vers 1266, Khubilai Khan, qui règne à Pékin, remettre aux frères Polo une toile d’amiante destinée à le protéger.

LA SAINTE CHAPELLE

Le roi saint Louis fait venir pour sa Sainte Chapelle deux reliques jusque là conservées à Constantinople. Une liste de 1241 mentionne une « table » ou « treille » dans laquelle certains auteurs ont cru voir le Linceul, replié sous la forme du mandylion. Selon eux, le roi Philippe VI aurait discrètement donné la relique à son premier possesseur français, Geoffroy de Charny.

LES TEMPLIERS

Quelques chercheurs, très imaginatifs, ont bâti des hypothèses mettant en action les Templiers, dont le Baphomet aurait été le Linceul replié, ou encore les Cathares ou la légende du Graal. Rien de cela ne repose sur des indices sérieux.

AUTRES HYPOTHÈSES

Le Linceul a pu passer directement des ducs d’Athènes, chassés de cette ville en 1311, aux Charny. Geoffroy de Charny, qui a fait un curieux voyage en Orient en 1345, a été plusieurs années compagnon d’armes du dernier duc d’Athènes, et meurt avec lui à la bataille de Poitiers en 1356.
Il est intéressant de noter que Dreux de Charny, oncle de Geoffroy, a épousé la fille d’un seigneur français de Grèce.

BESANÇON

L’élément majeur des thèses comtoises est la présence jusqu’en 1794 d’un « Saint Suaire » à Besançon, mais cet objet, apparu au XVIe siècle seulement, n’était en toute vraisemblance qu’une des copies, brûlée à la Révolution, du Saint Suaire de Lirey. On connaît de nombreuses copies de cette époque, dont la plus célèbre est celle de Lierre (Belgique).



LE LINCEUL DE TURIN

Linceul de Constantinople ou Linceul de Turin. L’iconographie prouve que le linceul conservé à Turin est bien celui de Constantinople. Des documents écrits donnent déjà quelques détails révélateurs. Mais les monnaies, peintures et mosaïques byzantines, montrent un visage du Christ directement inspiré par l’image du Linceul, dit de Turin.

LE LINCEUL A LIREY

Le Linceul réapparaît à Lirey en Champagne au milieu du XIVe siècle. Geoffroy de Charny, aidé par les rois Philippe VI puis Jean II, fonde une collégiale dans son fief de Lirey en Champagne. Dès 1353, le pape et différents évêques créent des indulgences en faveur des pèlerins qui affluent dans la collégiale, où ils peuvent vénérer le Saint Suaire, comme le montre une médaille souvenir du pèlerinage à Lirey.

LE MÉMOIRE DE PIERRE D’ARCIS

Unique document historique invoqué par les adversaires du Saint Suaire, le mémoire rédigé en 1389 par l’évêque Pierre d’Arcis soutient que le Linceul est un faux. Il se fonde sur l’attitude de l’évêque de Troyes vers 1355 et les aveux, à la même époque, d’un peintre qui aurait réalisé l’image du Linceul. Mais le différend de 1355 n’a pas existé et l’image ne peut pas être l’œuvre d’un peintre .

À SAINT-HIPPOLYTE

En 1418, le seigneur de Lirey emporte, pour le mettre à l’abri des tribulations de la guerre, le Linceul à Saint-Hippolyte en Franche-Comté où il est conservé jusqu’en 1452. C’est sans doute pendant ce séjour qu’est confectionné le faux Saint Suaire de Besançon.

À CHAMBÉRY

Marguerite de Charny, petite-fille de Geoffroy, refuse de rendre à la collégiale de Lirey le Linceul revenu de Saint-Hippolyte. Par sécurité, elle préfère le donner au duc de Savoie dont la famille en reste propriétaire jusqu’en 1983, date où le roi d’Italie, Humbert II, le laisse en legs au Saint Siège.
Après quelques pérégrinations donc, le Linceul est confié en 1452 à la Sainte Chapelle de Chambéry, capitale des ducs de Savoie. C’est dans cette chapelle qu’en 1532 un incendie l’endommage gravement. L’image est néanmoins à peu près préservée et le tissu réparé en 1534 par les Clarisses.

À NICE

Du fait des guerres avec la France, le Linceul connaît encore quelques péripéties qui l’amènent notamment à Nice où il est conservé de 1537 à 1543. Avec une chapelle du Saint Suaire, confiée aux Pénitents rouges, Nice conserve encore un souvenir vivant de ce séjour.

L’ARRIVÉE A TURIN

Pour la préserver du danger français, le duc de Savoie transfère sa capitale à Turin, à l’abri des Alpes. Sous prétexte de permettre à saint Charles Borromée de vénérer le Saint Suaire, il fait venir en 1578 la relique dans la capitale piémontaise où elle reste.

LA CHAPELLE DU SAINT SUAIRE

Après avoir connu des installations provisoires à Turin, le Linceul est déposé en 1694 dans la chapelle construite à son intention derrière le chœur de la cathédrale. Il ne la quittera définitivement qu’à la suite de l’incendie de 1997.

LES OSTENSIONS

Le Linceul est, de temps à autre, sorti de son reliquaire et déployé pour le montrer aux fidèles : ce sont les ostensions. Faites dans la cathédrale ou à l’extérieur, elles sont assez nombreuses au XVIe siècle, puis se raréfient, notamment aux XVIIIe et XIXe siècles.

L’OSTENSION DE 1898

On innove à l’occasion de l’ostension de 1898. Au lieu de montrer simplement le Linceul, on l’installe plus durablement dans un cadre. Cette disposition permet à de nombreux pèlerins de le voir et surtout à Secundo Pia de prendre les photographies qui sont à l’origine des recherches sur la nature et l’authenticité du Saint Suaire.

LES RECHERCHES DE 1978

De nombreux travaux sont menés pendant tout le XXe siècle. Mais ce n’est qu’après de premières approches en 1969 et 1973 qu’une équipe de scientifiques américains est admise à se pencher sur le linceul lui-même, à l’examiner et à y faire des prélèvements à l’aide des techniques les plus récentes.

LE CARBONE 14

En 1988, trois laboratoires reçoivent des échantillons du Linceul et les analysent au moyen de cette nouvelle méthode. Ils datent le linge du Moyen Age (1325 ± 65 ans). Les réactions sont vite diverses.

LES DERNIÈRES OSTENSIONS

Une nouvelle ostension a eu lieu en 1998 pour le centenaire de la première photographie du Linceul. Le Saint Suaire est présenté étendu dans une caisse vitrée, où il reste désormais enfermé, et qui assure sa conservation. Une autre ostension a eu lieu dans les mêmes conditions du 26 août au 22 octobre 2000, à l’occasion de l’année jubilaire.